Théâtre : « Lettres à un jeune poète » de Rainer-Maria Rilke aux Déchargeurs

Le théâtre des Déchargeurs nous présente actuellement l’Å“uvre culte de Rainer-Maria Rilke, Lettres à un jeune poète. Théâtraliser des échanges épostolaires est un pari audacieux que Jean-Christophe Barbaud a su, avec talent, relever avec brio. En donnant du corps à ces lettres, il a su imprimer et partager la philosophie de vie intrinsèque et géniale de ce poète dont l’aura n’a jamais faibli.

Monument de philosophie ou voyage intérieur, Lettres à un jeune poète s’inscrit dans le registre des oeuvres classiques devenues cultes. Cette guidance spirituelle demeure le point d’orgue d’un poète dont le génie s’est éteint trop tôt. L’immense poète que deviendra Rilke n’a que 28 ans lorsqu’il entame des échanges épistolaires avec Franz Kappus, 20 ans, poète en herbe et cadet à l’école militaire que Rilke avait désertée quelques années plus tôt. Dix lettres seront échangées de Paris, où Rilke est secrétaire de Rodin, puis de Suède, de Rome ou encore des alentours de Brême. Ces dix lettres sont autant de précieux manuels de philosophie qui soulèvent les thèmes immortels de la création, de l’amour ou encore de la solitude.

Dans une interprétation remarquable de Frédéric Schmitt, qui rend ces lettres parfaitement audibles, nous sommes les témoins de ces échanges, des interrogations et des doutes qui se font jour chez Franz Kappus. La mise en scène a largement prévu des moments de réflexion où la plume de Rilke saisit le jeune Kappus. Ce faisant, ces moments de réflexions accusent des silences salutaires pour le public qui ressent l’étendue et la profondeur de ces lignes admirables. Ce voyage intérieur dans le temps et l’espace est constitué de délicats moments de partage et d’humanité. Ce legs précieux de ce poète à la postérité est à savourer sans modération.

Laurent Schteiner