« La vie rêvée » de Kelly Rivière

Les Plateaux Sauvages nous invitent à découvrir actuellement la dernière création de Kelly Rivière, La vie rêvée. Ce spectacle, qui touche à l’intimité de l’artiste, révèle son parcours professionnel, une vocation farouche de devenir artiste. Reprenant à rebours la genèse de cette vocation, elle inscrit avec talent son chemin de vie marqué par l’humour et le contraste. Kelly Rivière a l’art de nous toucher et de rendre chacune de ses créations subtiles et émouvantes.

40 ans constitue l’âge de la maturité et à cette occasion, Kelly Ruisseau entame un bilan sur ses choix professionnels qui l’ont conduits à ce point d’encrage actuel. Désormais intermittente, délaissant l’instant, elle convoque le burlesque et le tragique afin de les verser dans une genèse qui a les accents d’un parcours de vie banal. Pour se faire, elle convoque certains membres de sa famille, aujourd’hui disparus, en leur permettant d’intervenir lors de ses questionnements. Hommage à ces disparus qu’elle a tant aimés, et qui l’espace d’une représentation, reprennent vie de façon truculente. Sa capacité de se fondre dans ses personnages lui permet de nous faire revivre les étapes clés de sa vie. Une existence où le doute, face cachée de ses multiples questionnements, ne la lâche pas.

Véritable tourbillon sur scène, elle nous enchante par ses différents accents dont elle s’empare pour nous faire revivre des situations qu’elle a su rendre cocasses. Son corps se mue à l’envi afin de dérouler ses plans professionnels dont la finalité est restée absconse et singulière. De la Murder Partiy pour une « team building » en entreprise aux ateliers de théâtre, elle ne cesse de se poser la question de sa légitimité dans ce métier. Le doute est inhérent à la réussite. Et à ce niveau, Kelly peut s’enorgueillir d’avoir réussi à devenir « une vraie professionnelle » reconnue et légitimée. Sur un même plan, Kelly traduit ce sentiment de fragilité lorsque l’histoire familiale revêt les traits de la perte de l’abandon. Malgré ses doutes et une mélancolie envahissante, son obstination  se traduit par une réussite éclatante. Chapeau l’artiste !

Laurent Schteiner