Festival Avignon : « Maison close chez Léonie » de Agnès Chamak & Odile Huleux

Le théâtre des Brunes nous offre actuellement un huis clos haut en couleur de Agnès Chamak & Odile Huleux, Maison close chez Léonie. Ce spectacle nous donne également une vision des maisons closes en ce début de XXe siècle dans la société régalienne de l’époque. 

Venir chez Léonie revient à visiter ses amis. On s’y sent bien et on y est bien accueilli. Après un moment de délice avec Céleste, Victoire ou Fantine, Léonie débouche toujours sa bouteille de prune pour contenter ses clients. Mais la vie de ces femmes en ce début de siècle est loin d’être une partie de plaisir ! Les passes s’enchainent même si Léonie prévoit des moments de pauses. Mère maquerelle tendre mais ferme avec son personnel, elle essaye toujours de le préserver au maximum.  Malgré cela, Céleste est enceinte de Félix et Fantine semble avoir attrapée la syphilis. Un beau jour, un rabatteur amène Louise, une jeune fille à l’aspect si jeune qu’elle pourrait passer pour mineure. Elle deviendra Colombe. Un soir, alors que le fils du Sous-Préfet Dumoustier choisit Colombe, la situation dérape brusquement. Tentant de la violer et de l’étrangler, Colombe se débat et le tue. Sa disparition est signalée et le tout-Paris recherche ardemment le fils Dumoustier…

A travers la dramaturgie de cette pièce, les autrices ont fait naitre la réalité de l’époque avec son cortège de répression de la prostitution. Loin de cet espace fantasmé, elles ont eu à coeur de montrer l’envers du décor.  On considérait la prostitution comme un mal nécessaire. Puisqu’on ne pouvait l’éradiquer, il convenait de la contrôler afin d’en limiter l’immoralité et de lutter contre les maladies vénériennes, principalement la syphilis. Toute prostituée devait donc être enregistrée par la police, qui lui délivrait une carte (on parlait de filles « encartées ») et l’astreignait à des contrôles sanitaires périodiques. On privilégiait pour cela la prostitution en maison « close », plus simple à encadrer.

Le rythme alerte de la pièce est soutenu par les chorégraphies endiablées des locataires du lieu et par la fluidité de la dramaturgie. Saluons les belles performances de Ariane Carmin, Maroussia Henrich et Taos Sonzogni qui apportent une dimension très réaliste au propos de la pièce. Enfin, il revient de souligner le travail remarquable de recherche des autrices pour se rapprocher au plus près du contexte historique de l’époque.

Laurent Schteiner