En aparté : Emma la clown

par | 28 Nov 2023

Emma la Clown nous revient avec 3 représentations exceptionnelles à la Scala. Une trilogie pour fêter dans la gaité ses 30 ans de carrière. Découvrez cet entretien, où se cachent derrière son nez rouge, une grande sensibilité, un humour décapant et une jolie poésie.

Laurent Schteiner : Plus connue sous le nom d’Emma la Clown, vous êtes une comédienne formée à l’école Jacques Lecoq. Quel a été votre parcours qui vous a amené à créer ce personnage et à le faire vivre pendant plus de 30 ans sur les planches ?

Merien Menant_ J’avais 13 ans quand j’ai fait pour la première fois du théâtre, au collège, dans une pièce de Françoise Sagan, le cheval évanoui. Quand j’ai joué cette pièce devant la classe, j’ai fait rire. Je ne m’y attendais pas du tout. C’était extraordinaire. Ma décision était prise. Je voulais faire du théâtre. J’ai fait beaucoup de théâtre amateur avant de me former à l’école Lecoq. J’avais 20 ans alors. Concernant le clown, j’étais assez ignorante. Mais faire rire était pour moi fondamental. Après l’école Jacques Lecoq, qui est une école formidable mais très chère, j’étais un peu fauchée. J’ai joué dans le métro avec un copain américain issu de l’école Lecoq. On jouait de la musique avec de petits instruments de musique. Il jouait du Ukulélé et moi du xylophone. Et on s’habillait en clown.

SLP_ comment s’est imposé ce personnage d’Emma la clown ?
M.M._  de lui même ! (éclats de rires). C’est très étrange de faire rire un public en clown. Faire rire en clown revient à exprimer en plus de l’humour, la tragédie et la poésie. Vivre 32 ans avec Emma la clown représente une vie totale. Elle s’est imposée naturellement. Le costume était là. La voix a été plus longue à obtenir. Au début, j’étais en duo avec Gaetano Lucido. J’étais l’Auguste. Lorsqu’on s’est séparés, j’ai endossé la part du clown blanc, celle qui parle et qui sait. Au fil des solos et des thèmes travaillés, il s’est développé une palette de jeu. Même encore maintenant, après 32 ans et une quinzaine de spectacles, je vais l’enrichir avec un spectacle en 2024 avec les chansons d’Anne Sylvestre accompagnée par Nathalie Miravette, sa pianiste. Quand je fais mes causeries, où j’improvise à 99% en interviewant quelqu’un, j’explore d’autres endroits de jeu que j’ignore. C’est insatiable et interminable.

SLP_ Pour quelles raisons avez-vous choisi de fêter vos 30 ans de carrière, à la Scala, avec une trilogie ?
M.M._  Parce que une quadrilogie, c’est moche ! 3 est le bon chiffre, et une trilogie est susceptible d’attirer du public. J’ai choisi les 3 spectacles qui me semblaient emblématiques : celui sur la souffrance humaine (Emma la clown sous le divan), sur la mort, et le dernier sur  le vide. Le fond du fond du fond de ce dernier spectacle  a été  basé sur la physique quantique, donc le vide quantique. Inutile de vous dire que je n’ai absolument pas regardé car cela aurait été incompréhensible. Je n’ai conservé qu’une phrase sur toutes les potentialités sur le vide. Cela parle de ce qu’il y a au fond de nous, vraiment !

SLP_ Quels sont les titres de ces 3 spectacles qui vont être à l’affiche de 3 soirées exceptionnelles ?
M.M._
Emma la clown sous le divan, Emma mort, même pas peur et qui demeure en ce lieu vide. Pour ce dernier spectacle, il faut remonter à l’époque de ma dernière année chez Lecoq. On donnait une phrase à chaque élève. Avec cette phrase, il devait faire 5 à 10 mn de spectacle en l’espace de quinze jours. Et moi, j’ai eu cette phrase : « qui demeure en ce lieu vide ? ». J’ai réalisé quelque chose de moyen. Puis, en 2005-2006, lors de mon deuxième solo, je me suis aperçue que je n’avais toujours pas répondu à cette question. Elle était toujours présente dans tous mes spectacles. Pour les 30 ans, j’ai décidé vraiment de répondre à la question. Aborder le vide m’amuse beaucoup. Entre humour et petit malaise, le public s’y retrouve pleinement. 

 

SLP_ Quelles sont les dates de ces 3 représentations exceptionnelles ?
M.M._ Le 6 décembre Emma sous le divan, Le 7 décembre Emma mort, même pas peur et le 8 décembre Qui demeure dans ce lieu vide ?

SLP_ Les projets ont été évoqués avec les chansons d’Anne Sylvestre…
M.M._
Oui, le spectacle s’intitulera Emma aime Anne. Ce spectacle pour moi est important car je connaissais bien Anne, et notamment à travers ses fabulettes. Et toujours bien sûr les causeries… 

SLP_Si on pouvait définir d’un mot le clown ?
M.M._J’ai entendu dans une émission, en 1972 je crois, que « les clowns étaient l’aristocratie des acteurs ». Je trouve cela très beau.

Propos recueillis par Laurent Schteiner

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