Danse : « Lumen » de Jasmine Morand

Le Théâtre de la Ville – Théâtre des Abbesses vient de mettre à l’honneur une pièce toute en subtilité de Jasmine Morand, Lumen. Le propos de ce spectacle contient en son sein de fortes connotations rappelant l’univers de Pierre Soulages. Marier la peinture à la danse est une idée inspirante pour ce spectacle de toute beauté mené avec intelligence et efficacité. 

Sur un plan incliné, treize danseurs allongés tous vêtus de noir, réalisent dans ce dispositif scénographique de magnifiques performances chorégraphiques. Des minces rais de lumières touchent quelques membres de ces corps allongées créant ainsi un tableau artistique de toute beauté. Chaque lumière propose une vision différente où les corps s’entremêlent et se détachent. On finit par voir autre chose, un magma humain, une hydre à treize têtes ou des figures géométriques composant des mosaïques abstraites qui forcent l’imagination. Ce mouvement incessant assure une fluidité du propos. La projection de ces rayons de lumière qui balayent l’obscurité apportent un éclat et une esthétique folle. Puis, la lumière troue de plus en plus l’obscurité jusqu’à devenir omniprésente. Les danseurs baignés de lumière et désormais debouts, ôtent leurs tenues noires pour un maillot blanc. Et c’est maculés de lumière qu’ils reçoivent en contre-champ une lumière blanche diffuse qui, paradoxalement, plonge ces performeurs dans une lumière atténuée les obscurcissant. On ne peut que noter ce travail d’orfèvre de Jasmine Morand où l’inspiration créatrice de Pierre Soulages se fond dans une performance chorégraphique où le clair obscur rappelle les tableaux du grand Caravage.

Laurent Schteiner