Henrik Ibsen fait actuellement sensation au Théâtre des Amandiers avec Les Revenants dans une mise en scène très soignée de Thomas Ostermeier. Sur fond d’histoire familiale incestueuse, Ibsen s’en donne à cœur joie  en nous faisant partager l’effondrement progressif d’une famille. Thomas Ostermeier en nous offrant un théâtre de l’intime examine étroitement les personnages dans tous les compartiments de leur personnalité. Son regard incisif permet de ressortir toutes leurs aspérités avec brutalité et horreur. Le réalisme est à l’honneur au Théâtre des Amandiers ! 

Osvald, le fils de Frau Alving, revient chez lui après quelques années passées à errer. Sa mère qui est veuve voit fréquemment le pasteur Manders, un ami de la famille. Régine, fille du menuisier Engstrand, est au service de Frau Alving. Le père de Régine souhaite que sa fille abandonne son métier pour venir vivre avec lui et de l’aider à monter son projet de café.

Les personnages sont ainsi campés et la force d’Ibsen est de disséquer à travers une situation, somme toute banale, des personnalités extrêmes. Leur analyse au fil de cette pièce et les révélations qui en découlent, nous conduisent au seuil de l’horreur. Ibsen appuie beaucoup sur le manque de soleil, de chaleur et le fait est, cette pièce sombre s’avère étouffante. Les personnages s’entredévorent et réduisent l’espace scénique à une désespérance de fond avec pour issue la déchéance.

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La mise en scène de Thomas Ostermeier est remarquable. Elle allie fluidité et simplicité. L’apport de la vidéo permet d’insister sur des détails qui soulignent la lourdeur de cette vie qui s’écoule lentement. La scénographie présente l’intérieur de l’appartement de Frau Alving. Un panneau amovible permet de découvrir tantôt la salle à manger tantôt le salon, le tout sur une scène tournante.

Régine est la seule personnalité qui illumine cette œuvre. Elle apporte sa joie de vivre et son penchant pour Osvald. Mais la dominante constante de la pièce demeure l’incapacité de construire quoi que ce soit. Tout est réduit en cendres. De l’amour naissant entre Osvald et Régine, de la maladie d’Osvald et des tentatives de sa mère pour le garder près d’elle, tout est anéanti.

Les comédiens sont remplis d’authenticité. Valérie Dréville est remarquable en mère incestueuse jouant sur de multiples registres, changeant de voix, signalant ses changements de personnalités. Mélodie Richard, dont le personnage sera brisé à la fin de cette pièce, interprète avec allant un personnage original et complexe. Eric Caravaca est juste exceptionnel grâce à la qualité de son jeu plein de subtilité. Enfin Jean-Pierre Gos joue interprète avec simplicité et efficacité ce rôle de pasteur peu conventionnel. Comme la qualité sied à merveille au Théâtre des Amandiers !

 

Laurent Schteiner

 

Les revenants d’Henrik Ibsen

Adaptation et traduction : Thomas Ostermeier et Olivier Cadiot

Mise en scène de Thomas Ostermeier

Avec Eric Caravaca, Mélodie Richard,Valérie dréville, Jean-Pierre Gos et François Loriquet

Scénographie : Jan Pappelbaum
Dramaturgie : Gianni Schneider
Vidéo : Sébastien Dupouey
Lumières : Marie-Christine Soma
Costumes : Nina Wetzel et Marie Abel
Musique : Nils Ostendorf
Assistante mise en scène : Elisa Leroy

 

Théâtre des Amandiers
7 avenue Pablo Picasso
92022 Nanterre
Location : 01 46 14 70 00
www.nanterre-amandiers.com

 

 

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