Avec le souci d’explorer de nouvelles formes théâtrales au service de la parole et de l’image, la Compagnie Mesden – fondée en 2009 par Laurent Bazin – dévoile au Théâtre Mains d’Œuvres à Saint-Ouen, une pièce à tonalité fantastique et enchanteresse.

Interpellé par le parcours romanesque de Édouard Buguet, photographe influencé par le mouvement spirite au XIXe siècle, Laurent Bazin s’empare du mythe qui rode autour du personnage (et de son procès qui a fait grand bruit) et imagine un récit visuel et onirique. Dans son atelier à Montmartre, Édouard Buguet serait capable de réaliser des clichés faisant apparaître des personnes disparues pour soulager les familles endeuillées… L’enquête peut commencer !

Venue-esprits

La salle à peine installée, les cinq comédiens entraînent les spectateurs au cœur du sujet de manière humoristique et détournée grâce à des photos, éveillant quelques souvenirs. Un moyen subversif de nous amener à plonger dans notre propre mémoire le temps d’un instant. Très vite, la pièce est plongée dans une obscurité quasi-complète et laisse apparaître un théâtre d’ombres remarquablement maîtrisé, l’histoire d’Édouard Buguet et de sa fille servant de modèle nous est alors contée. Avec grâce et docilité, les comédiens se transforment alors en pantins de papier et une même voix off distribue les différents rôles. On découvre rapidement la supercherie du photographe-médium, démasquée par l’homme au monocle dans la pièce, personnage énigmatique et effrayant, qui n’est autre que Guillaume Lombard dans la réalité.

Multiplicité des supports oblige, le décor change spontanément, et un plateau radio fait son apparition. Là aussi l’imagination du metteur en scène, accompagné de près par son assistante à la mise en scène fait irruption dans ce purgatoire anachronique où Édouard Buguet se justifie de ses actes auprès des jurés. La photographie mémorisant une pause, la radio retient les voix. La présence du corps radiophonique soulève la problématique des médias actuels omniprésents en laissant peu de souffle à « l’invité ».

 La Venue des esprits est une pièce sur le songe d’une vie et de ce qu’on laisse, les souvenirs qui restent, le prétexte d’une explication cartésienne au travail expérimental du photographe Édouard Buguet qui laisse derrière lui une immense part de mystère. La scène finale est un hommage à la photographie d’hier, éphémère comme un embrasement soudain. Une création fascinante à voir et à revoir.

Coline Rouge

La Venue des esprits
Cie Mesden
Avec Svend Anderson, Audrey Bonnefoy, Elsa Grzeszczak, Fabien Joubert et Chloé Sourbet
Conception et mise en scène : Laurent Bazin

  • Collaboration artistique et univers photographique : Svend Anderson
  • Collaboration dramaturgique et assistanat à la mise en scène : Magali Chiappone Lucchesi
  • Création lumières : Yragaël Gervais avec la complicité d’Alice Versieux
  • Création sonore : Alicya Karsenty
  • Accessoires : Manon Choserot
  • Scénographie : Bérengère Naulot
  • Costumes : Patrick Cavalié
  • crédit photos : Cie Mesden

Du 25 janvier au 3 février 2015

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