Après « La discrète amoureuse », Justine Heynemann retrouve Félix Lope de Vega pour un spectacle haut en couleurs placé sous le signe du divertissement.  « La Dama Boba » est en effet une farce truculente dynamitée par l’énergie débordante d’une distribution en folie. 1H45 de rires et de délires, de gags en tous genres, de quoi réchauffer les coeurs en ce début de saison frileux.

Lointain cousin de notre classique « Les femmes savantes » ou même « Les précieuses ridicules », « La Dama Boba » s’avère être une comédie emblématique espagnole aux ressorts bien ficelés. Félix Lope de Vega y ajuste avec maestria une série de revirements tout en n’oubliant pas de questionner, non sans ironie, notre rapport à l’intelligence d’autrui.  Un raisonnement philosophique qui servira d’excuse jubilatoire à la manipulation de toute une galerie de personnages tordants.

L’intrigue est simple au départ, dans la maison du seigneur Otavio deux soeurs; Nise jolie et brillante jeune fille qui passe son temps dans les livres et Finéa belle idiote qui n’arrive pas à aligner deux lettres de l’alphabet. Pour compliquer le tout il s’avère que Finéa, et Finéa seulement, a touché un énorme héritage la promulguant donc directement au rang de jeune fille à marier d’urgence. Les courtisans de la maison sont alors face à un cruel dilemme, épouser la soeur savante mais sans le sou ou la soeur richissime mais totalement inadaptée. Les apparences sont évidemment trompeuses et après de tumultueux retournements de situation,  jalousies et malversations, qui peut bien dire qui est au final intelligent et qui ne l’est pas tant que ça ?

Avec cette création Justine Heynemann célèbre le cabotinage, le hissant presque au rang d’art, elle en fait une discipline exigeante que ses comédiens maîtriseraient à la perfection. Tout ici est placé sous le signe du jeu, c’est un théâtre festif qui n’a jamais peur du trop et qui explose littéralement de tous les côtés. Le marivaudage y est délicieux, ponctué de scènes musicales excellentes, le rythme  est effréné, tout tourbillonne et gesticule dans tous les sens. Véritablement c’est la joie qui déborde sur le plateau du Théâtre 13, et en coulée contagieuse elle entraîne tout sur son passage. Il faut dire que cette équipe d’acteurs mouille généreusement la chemise et semble prendre un plaisir incommensurable à incarner ses caricatures, adorables ou détestables c’est selon. Incontestablement Justine Heynemann s’entoure une fois de plus d’une troupe complice qui nous régale à chaque replique. Saluons également la scénographie tout aussi ludique qui parfait l’ensemble. Vous l’aurez compris, si les premiers flocons de neige et le froid glacial du moment vous dépriment, une seule destination : la chaleur de l’Espagne irradie joyeusement du côté du Théâtre 13 Jardin.

Audrey Jean

« La Dama Boba ou celle qu’on trouvait idiote » texte de Félix Lope de Vega
Mise en scène Justine Heynemann
Compagnie Soy Création

Avec Sol Espeche, Stephane Godin, Corentin Hot, Remy Laquittant, Pascal Neyron, Lisa Perrio, Roxanne Roux et Antoine Sarrazin

Traduction Benjamin Penamaria
Adaptation Benjamin Penamaria et Justine Heynemann
Scénographie Thibaut Fack
Crédits photos Cindy Doutres

Théâtre 13 Jardin jusqu’au 17 Février
Du mardi au samedi à 20h
Dimanche à 16H

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