Théâtre : « coupables d’amour » de Nathalie Kanoui

Le théâtre de la Reine Blanche nous convie actuellement à un spectacle magnifique d’intensité, Coupables d’amour de Nathalie Kanoui. Dans une mise en scène construite avec intelligence et exigence, Anne Le Guernec nous ouvre les portes de celles dont la vie conjugale était un supplice. Où leur survie passait par l’anéantissement de leur bourreau. Un amour ordinaire qui vire au cauchemar, un amour corrodé qui se réduit en peau de chagrin les conduisant à l’ultime extrémité. 

Trois destins de femmes nous sont présentés. Toutes n’ont pas eu le même parcours mais l’insupportabilité de leur existence nécessitait un passage à l’acte pour elle ou leurs proches. Des salles d’audience au tribunal à la prison, nous découvrons avec effroi le prix à payer pour avoir tué son bourreau. Ces trois femmes complètement différentes rassemblées dans une cellule hisse l’étendard d’une sororité qu’elles n’auraient jamais envisagé au départ. Même si les fantômes de leur passé continuent de les hanter, elles poursuivent leur chemin. Elles assument leurs actes car il n’y a avait rien d’autre à faire si ce n’est mourir ou devenir folle. 

L’histoire est construite de telle sorte que le public devient l’auditoire des assises où les avocates nous déroulent le passé de ces femmes sacrifiées sur l’autel d’un amour auquel elles avaient cru. Les comédiennes changent de personnage avec rapidité et efficacité afin d’apporter une large appréciation de la vérité du tribunal à la prison. Les liens amicaux et affectueux se tissent à la faveur de cette sororité créée par besoin et nécessité. Mais cette pièce pose d’autres problématiques qui enrichissent cette histoire en dépassant son cadre intrinsèque. Comment se réacclimater à la liberté ? Comment sort-on d’une telle épreuve ? On l’aura compris, on se sort pas indemne de cette pièce interprétée avec maestria par ces 3 comédiennes.

Laurent Schteiner