Actuellement à l’affiche du Théâtre du Châtelet jusqu’au 29 juin, « The King and I » s’impose au terme d’une production irréprochable comme un modèle du genre. Après le succès de sa précédente mise en scène « Into the woods » Lee Blakeley s’empare de ce grand musical de Broadway pour nous offrir 3h15 de pur ravissement pour les yeux et les oreilles. Une machinerie colossale qui sert de précieux écrin aux têtes d’affiche Lambert Wilson et Susan Graham, tous deux irrésistibles. Amateurs de comédies musicales c’est à ne manquer sous aucun prétexte ! 

 
PHO8f240e72-f2fd-11e3-a50e-eaef6dae27aa-805x453
Plutôt méconnu en France « The King and I » fait figure de classique à Broadway et a notamment profondément été marqué par la performance de Yul Brynner dans le rôle titre du roi de Siam. Le roman dont est issu le spectacle a même fait l’objet d’une adaptation au cinéma. C’était donc un pari audacieux de le produire au Théâtre du Châtelet et de se délivrer du poids des anciennes versions. Fort de son succès avec « Into the woods » le  Châtelet s’est donné les moyens de réitérer l’exploit, et quel exploit ! Tout, jusque dans les moindres détails est soigné, précis mettant en exergue une production impeccable et impressionnante. Un spectacle de toute beauté à la mise en scène millimétrée, un voyage inoubliable pour Bangkok et la promesse d’admirer durant 3H15 des artistes de talent. 
 
Au tout commencement il y a un roman « Anna and the king of Siam » écrit par Margaret Landon et inspiré de la véritable rencontre d’Anna Leonowens et du roi Mongkut dans les années 1860. Préceptrice anglaise elle est engagée au service du roi pour éduquer ses nombreux enfants. Une collaboration qui ne sera pas de tout repos, tous deux avant un caractère explosif et souhaitant imposer à l’autre son point de vue. Au centre de l’enjeu donc la tolérance, Anna étant confronté immédiatement aux coutumes d’un autre monde qu’elle devra comprendre afin d’espérer éduquer les enfants avec bienveillance. Mais en arrière-plan on retrouve un autre sujet de fond plutôt incarné par le personnage du roi, celui d’un combat à mener entre respect des traditions et modernisme. Ce roi est en proie au doute et malgré son prime abord directif et buté, on le découvre peu à peu se questionnant sur les difficultés de gouverner un peuple, hésitant à renouveler la forme pour s’ancrer dans une gestion plus moderne de sa politique. C’est dans cette faille qu’Anna pourra s’immiscer et tenter de faire bouger les lignes, évoluant du même coup vers un adoucissement de sa personnalité. 
 
Comme souligné plus tôt il s’agit au delà d’une partition musicale de grande qualité d’un spectacle grandiose dont  le visuel n’aura de cesse de vous éblouir. Le décor est extrêmement soigné découvrant au fur et à mesure à l’aide de panneaux coulissants de nouvelles pièces dans ce palais chatoyant. Chaque dorure, chaque couleur est ici particulièrement réfléchie, donnant place à une esthétique envoutante qui vous transportera aussitôt à Bangkok. Saluons l’incroyable travail effectué sur les costumes par Sue Blane, la richesse des étoffes et la multiplicité des confections contribuent amplement au succès de l’ensemble. Mention spéciale toutefois pour la scène du ballet « La petite maison de l’oncle Thomas » véritable spectacle dans le spectacle. Cet apartheid permet à la princesse Tuptim d’interpeller le roi afin de dénoncer les formes archaïques d’esclavage et met à l’honneur des chorégraphies sublimes d’influences asiatiques.  Quand à la direction d’acteur de Lee Blakeley elle ne souffre d’aucun défaut, rendant encore plus impressionnante la machinerie d’autant que la distribution compte une vingtaine d’enfants. Lambert Wilson et Susan Graham tiennent leur partition à la perfection mais nous n’en attendions pas moins de ces comédiens de talent. Enfin nous avons été littéralement bouleversés par la soprano Je Ni Kim dans le rôle de la princesse Tuptim, chacune de ses interventions fut un moment de pure émotion. 
Vous l’aurez compris nous sommes dorénavant à court d’adjectifs pour qualifier ce musical il ne nous reste plus qu’à vous conseiller fortement de vous rendre au Théâtre du Châtelet, vous n’en croirez pas vos yeux ! 
 
Audrey Jean 

« The King and I » mise en scène de Lee Blakeley 

Musique de Richard Rodgers 
Livret et lyrics de Oscar Hammerstein II
d’après le roman de Margaret Landon 
Chorégraphie originale de Jerome Robbins

Avec Lambert Wilson, Susan Graham ou Christine Buffle, Je Ni Kim, Damian Thantrey, Lisa Milne, Akihiro Nishida, Robert Dauney, Joe Sheridan, Benoît Nguyen Tat, Jean-Baptiste Phou, James Clack ou Raphaël Willenbrock, Noam Guetta ou Koji Hironaka, Violette Bottazi ou Gabrielle Le Gall
Avec l’orchestre Pasdeloup, le chÅ“ur du Châtelet et le chÅ“ur des enfants
Jusqu’au 29 Juin
Théâtre du Châtelet 
2 rue Edouard Colonne 
75001 Paris 
Share This