La Nouvelle Fabrique, jeune compagnie originaire de la région lyonnaise, dispose depuis quelques années d’une carte blanche au théâtre de l’Opprimé. Cette année, elle a choisi notamment de mettre Edward Bond à l’honneur dans une pièce où l’auteur manipule à la fois l’humour et la philosophie dans une fable décalée sur la fin du monde. Cette pièce jouée avec brio par ces jeunes comédiens, tous issus de l’Ensatt, qui apportent leurs jeunes talents à une mise en scène éclairée et efficace.
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Edward Bond pose un regard particulier sur le monde qu’il considère comme une farce tragique. Un monde vu ou ressenti comme une vaste entreprise de démolition si l’individu ne se tourne pas vers l’autre, son double. Cette comédie parfois grinçante, témoigne d’un certain pessimisme de l’auteur, dénonçant dans chaque scène « ce monde qui part en vrille ». Cette assertion est présente dans chaque scène avec en arrière-fond une sensation de fin du monde. Les tentatives désespérées des protagonistes de cette pièce pour sauver le monde sont diverses et variées. Un seul dénominateur commun rapproche tous ces personnages : leur obstination grotesque à sauver le monde. Tout nous ramène à ce point névralgique avec en filigrane cette question : dans quelle mesure l’humanité existe-t-elle ? Peut-on être au monde sans comprendre autrui ?
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La scénographie à géométrie variable traduit les univers rencontrés des personnages qui nous invitent à partager cette page burlesque. Ce décor simple mais efficace est représenté par un ensemble de planches qui nous permettent de visualiser les scènes de rues ou d’immeubles en démolition. La bande son, elle-même s’attache à reproduire les bruits des entreprises de destruction. Des sons qui s’apparentent à ceux inquiétants d’une fin du monde proche. Toutefois, comme un clin d’œil, la chanson « Feel » de Robbie Williams apporte son écot à la question philosophique de Bond sur la perdition de l’humanité et de son éventuel rachat.
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La mise en scène de Colin Rey et d’Estelle Gautier est percutante et efficace. Ils apportent une forme de théâtre réaliste où les effets sont suggérés sans jamais tombés dans la facilité. Tout est juste ; ce qui donne à l’ensemble du propos une cohérence propre à séduire le public grâce à une interprétation qui met en évidence tout le jus de la pensée de l’auteur.Â
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Tous les personnages sont animés avec puissance. Marie-Cécile Ouakil interprète avec beaucoup d’à -propos et de drôlerie cette femme flic obsédée par une collègue qui a la particularité de porter des boucles d’oreille d’un genre particulier. Thomas Fitterer joue un Nelson très authentique et  proche d’une humanité qui existe bel et bien. Ses tribulations erratiques marquent le fil de la pensée de l’auteur. Viv, interprétée par Marie Ruchat est impeccable dans le rôle de cette adolescente qui pense être le dernier rempart ou l’ultime protection contre la fin du monde. Clément Carabédian joue alternativement le chef de chantier et l’unijambiste. Il nous livre un numéro de danse inclassable et décalé avant de se lancer dans des fandangos qui résonnent comme une danse macabre de fin du monde. Son interprétation haute en couleurs de ces deux personnages reforce la dynamique de l’ensemble de la pièce.
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« Il y va de notre humanité que nous devenions des sismologues de nos propres désastres et que nous apprenions à lire le chaos, ce désordre que nous ne savons pas encore déchiffrer. »
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Laurent Schteiner
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Le Numéro d’équilibre d’Edward Bond
Mise en scène de Colin Rey et d’Estelle Gautier
Scénographie : Estelle Gautier
Lumière : Matthieu Durbec
Costumes : Eve Ragon
Son : Thibaut Champagne
Avec Clément Carabédian, Thomas Fitterer, Marie-Cécile Ouakil et Marie Ruchat
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Théâtre de l’Opprimé
78 rue du Charolais
75012 Paris
Résa : 01 43 40 44 44
Du 3 janvier au 11 janvier 2012
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La Nouvelle Fabrique
38 avenue Jean Jaurès
69007 Lyon
http://Lanouvellefabrique.free.fr
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Et également paru chez l’Arche-Editeur :
12 €
ISBN 2-85181-620-9
 L’Arche éditeur
86 rue Bonaparte
75006 Paris
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