Des répliques taillées à la hache, des héros à la fois attachants et monstrueux, la crudité d’un ton sans concession, le tout macéré dans un humour au vitriol,  il s’agit là de l’inimitable style d’Hanockh Levin, auteur israélien prolifique décédé en 1999.  L’impossible rêve  américain de trois « déglingués » de la vie : une pute et deux mendiants père et fils.

 

Pour son soixante-dizième anniversaire, Hoyamer, un mendiant beau parleur,  veut s’offrir  les services d’une prostituée usée et lasse, Kokotska.  Après une difficile négociation sur le montant de la passe, Hoyamer se résout à payer le prix exigé et tente de « s’envoyer en l’air » mais le pauvre hère reste bloqué sur le tarmac.  Incapable de jouir du service, il décide d’en faire profiter son fils, Hoyamel.  L’acte scelle ainsi les retrouvailles du père et du fils. Hoyamel voit là un signe de la mort imminente de son père : il ne désire qu’une chose : hériter du magot « planqué » par son père. Hoyamer, quant à lui, se raccroche  à un fantasme : une putain vivant dans l’Ohio, si riche qu’elle » baise » gratuitement.  Tandis que Kokotska est prête à tout pour vivre son  rêve :  bronzer sa misère au bord d’une piscine hollywoodienne.

 

Dans le théâtre de Levin, les honnêtes gens devraient s’offusquer ou pleurer sur le poisseux destin de ses héros affreux, sales et méchants, mais ils préfèreront toujours en rire.  Point de tragique, mais de l’acidité, de l’âpreté et du rire.  La virtuosité du texte réside dans l’invraisemblable et le grotesque espoir de ces personnages qui le temps d’un rêve s’envolent.   Laurent Gutman a fait le choix  de la simplicité scénographique  et de  tout nous montrer : pertinent ! Pas de demi-mesure ni dans la mise en scène, ni dans le jeu des comédiens qui se donnent tous à corps perdus dans leur personnage de ratés : magistral !

Au dessus de leur tête,  trois paysages merveilleux, et comme en exergue à la scène « Just a dream ? ». En bas , la terre, et un résidu d’urbanisme,  deux  poutres IPN comme   le croisement d’un chemin sans issue.  Au bout de la course, pas grand chose si ce n’est la consolation, le rêve et l’illusion comme Vérité.  Grandiose !

Sabrina Amghar

 

La putain de  L’Ohio d’Hanokh Levin

Traduction : Laurence Sendrowicz

 

Mise en scène  : Laurent Gutmann

avec Guillaume Geoffroy, Éric Petitjean et Catherine Vinatier

Costumes  : Axel Aust

Lumière : Yann Loric

Maquillage et perruques : Catherine Saint Sever

Régie générale  : Armelle Lopez

Crédit photo : Nicolas Grosbois

 

Théatre de l’Aquarium

La cartoucherie
route du Champ de Manœuvre
75012 Paris

Du 8 novembre au 30 novembre 2012 

du mardi  au samedi à 20h30, le dimanche à 16h

Réservations : 01 43 74 72 74

www.theatredelaquarium.net

Share This