Il y a foule ce soir là, un bruissement d’excitation court, le public se presse au Monfort Théâtre, le spectacle est complet et il l’était déjà au 104 au mois de Janvier. Créée en 2016 et en passe de devenir absolument culte sans pour autant pouvoir être rangée dans aucune case « Grande » est une aventure, pour les artistes comme pour les spectateurs, une course folle, un parcours d’embûches, de répétitions, d’essais ratés et de gloires absolues. Un espace beau et mélancolique, bordélique et sublime, un suspens indéfinissable d’ou l’on sort totalement sonné et conquis !

Qu’avons-nous vu ce soir là au Monfort ? Qu’ont-ils vécu ces deux artistes sur le plateau ? Impossible à résumer de façon pragmatique et littéraire tant l’expérience est unique. Pourtant, nous étions préparés à l’originalité, à une forme de folie, de délire peut-être, on nous avait même remis un plan en guise de programme, histoire de ne pas se perdre dans le dédale de propositions, histoire de suivre avec eux un fil, un sens. Mais bon. Finalement non. La première revue est explicite et donnera le ton, nous commencerons par la fin, nous rembobinerons, nous recommencerons à l’identique, nous chercherons un sens qui n’existe pas et puis nous tomberons amoureux, comme eux. À moins que ce ne soit tout l’inverse. S’en suit un striptease improbable et nous voilà embarqués. Vimala Pons et Tsirihaka Harrivel composent avec minutie un univers foisonnant, tourbillonnant, une mosaïque de numéros qui rendent hommage à la mémoire du cirque mais également à quelque chose de profondément actuel et novateur. Au fil des revues se détache une éclatante déconstruction du sentiment amoureux, une méthodique recherche sur le rapport à l’autre. Chacun avec son bagage, son talent, sa personnalité se présente dans son entier face à l’autre. Elle porte des choses sur sa tête, lui glisse ou chute inexorablement. Et ils se rencontrent encore et encore, se rattrapent, s’aident, se bousculent, dessinant de long en long un chemin de l’amour. Le geste, le corps comme matière première pour ces circassiens de haut-vol. Le plateau submergé d’objets comme terrain de jeu, comme territoire ami et hostile à la fois. La musique, les sons aux accents technos comme pulsation, comme métronome du rythme à tenir. La performance est hypnotisante, les interprètes éblouissants et il faudrait certainement voir le spectacle plus d’une fois pour en décoder tous les mystères. Mais qu’importe, « Grande » finalement est infini, tout en lui  se complète, tout se revoit, tout se rembobine. Pour encore très longtemps espérons.

Audrey Jean

« Grande » 

Réalisation, Conception, Création Objets, Création Accessoires, Dispositif sonore, Dispositif lumière, Musique & Arrangements :Tsirihaka Harrivel & Vimala Pons

Régie générale & chef de poste Plateau : Florian Méneret

Régie Son & Plateau : Emmanuel Laffeach

Régie de Création : Élise Lahouassa

Costumes : Rémy Ledudal et Vimala Pons  

Réalisation des Constructions : Mathieu Delangle, Emmanuel Laffeach, Julien Vadet, Florian Méneret, Marion Abeille, Flavien Renaudon, Tsirihaka Harrivel, Élise Lahouassa

Jusqu’au 6 Mai
Du mardi au samedi à 20H30 au Monfort Théâtre 

En partenariat avec le Théâtre de la Ville 

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