Les spectateurs se bousculent en ce moment au Théâtre Monfort pour assister à la reprise d’un spectacle emblématique de la Compagnie Les Sans cou « J’ai couru comme dans un rêve ». Issue d’une écriture de plateau collective, ce qui constitue une de leurs marques de fabrique, cette création nous entraine dans une réflexion profonde sur nos peurs face à la mort, et par extension sur la nécessite absolue de ne pas s’écarter de l’essentiel. Enthousiasmant !

Que feriez-vous si vous appreniez qu’il ne vous reste que quelques jours à vivre ? Question existentielle que l’on s’est tous posé au moins une fois. Pour Martin le personnage principal de « J’ai couru comme dans un rêve » la question est bien réelle. Il a une tumeur foudroyante au cerveau, il va mourir. Très vite. Trop vite évidemment. Beaucoup trop vite pour celui qui apprend le même jour qu’il va aussi être papa. Martin plonge alors corps et âme dans une spirale infernale, une course contre la montre, une urgence de chaque instant pour tenter de répondre à la deuxième question. Qu’est ce qui importe finalement ? Les Sans cou prennent à bras-le-corps ce sujet universel avec l’inventivité qui les caractérise. A l’instar des sursauts nerveux de Martin pour organiser ses derniers instants le spectacle est par endroits furieux, comme hystérisé. La dramaturgie est éclatée oscillant sans cesse entre les confrontations crues au réel de la situation et des projections plus fantasmées. Tout comme le mental de Martin, ça vrille, ça fuse, ça part dans tous les sens. Disons le, le spectacle paraît inégal errant parfois entre bavardages philosophiques et l’hystérie de l’urgence, la violence des sentiments exacerbés par la fin toute proche. Mais très étrangement, c’est précisément de ces inégalités qu’il tire sa plus grande force, provoquant dans ces alternances de rythme des fulgurances où l’émotion surgit avec brutalité. On ne s’y attend pas, jamais, on rit, on pleure, on s’ennuie, on réagit enfin face à nos propres peurs illustrées là sur ce plateau, face à nos rêves aussi. La compagnie Les Sans cou est ancrée dans ce théâtre actif, en mouvement permanent que ce soit dans les thèmes abordés ou dans cette forme de traitement bordélique et méthodique. S’ils se sont depuis illustrés sur bien d’autres spectacles, « J’ai couru comme dans un rêve » reste incontestablement une de leurs plus belles réussites.

Audrey Jean

« J’ai couru comme dans un rêve » Création collective Les Sans cou 
Mise en scene Igor Mendjisky 

Avec Éléonore Joncquez ou Raphaèle Bouchard, Esther Van Den Driessche, Clément Aubert, Igor Mendjisky ou Romain Cottard, Paul Jeanson, Arnaud Pfeiffer, Frédéric Van Den Driessche

Du mardi au samedi 20h30

Théâtre Monfort 

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