Christophe Pellet nous revient chez l’Arche Editeur dans un essai profond où les différents aspects de son monde contemplatif rejaillissent sur son âme, son corps. Il opère une distinction de qualité entre le contemplateur (ou action) et le contemplatif. La contemplation devient alors une expression de revendication que Christophe Pellet qualifie de subversive.
Â
Le contemplateur est davantage ancré dans la réalité, dans l’objet-matière. Il s’attache à percevoir le concret des choses et des êtres jusqu’à les rendre abstraits. Selon Victor Hugo, son esprit se modifie et aboutit à une « révélation ». A l’inverse, le contemplatif ne serait-il qu’un idéaliste ?  La sérénité et le bien être comme centre d’intérêt. A l’inverse, une philosophie de l’action peut se dégager et inviter à la « résistance subversive» battant en brèche une contemplation passive axée sur le visuel et son influence sur la conscience.
Â
« Dans les deux cas, la contemplation bouleverse l’organisation sociale, la remet en cause en la renvoyant au néant, au chaos des origines, ou au contraire en l’enrichissant d’une réflexion éprise d’absolu et d’infini. Dans tous les cas, s’impose un conflit. Une subversion du réel. »
Â
Cette observation trouve sa source au sein de l’écriture. L’être contemplateur (ici le lecteur) rencontre la matière et son esprit s’en trouve modifié. L’artiste, ici, l’écrivain bouleverse les consciences des lecteurs. Les mots nous ramènent à notre propre définition, à notre être. Nous délaissons le fil de la lecture pour laisser filtrer nos propres impressions. C’est une irruption du réel dans « l’élan de notre lecture ». Cette « voix immatérielle de l’écrivain devient matière par le style, et ce style une matière à contempler par le lecteur ». Le temps et l’espace seront indissociables des mots. L’espace mental de l’écrivain et celui du lecteur. Ce ressenti est également valable pour les films où ce frottement, cette fusion crée entre la matière et l’esprit un acte amoureux.
Â
La convocation de Sade à ce stade de la réflexion interpelle car les hommes et les choses constituent la matière. Nous agissons de la même façon lorsque nous contemplons l’objet désiré qui devient une matière par notre contemplation. Un objet dont la possession nous renvoie à un instinct archaïque et animal. « Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des crimes d’amour. » (Sade). C. Pellet estime de ce fait qu’une part d’égocentrisme existe dans la contemplation comme dans la jouissance. Si le corps devient de la matière, un détachement peut s’opérer en ramenant l’être à une forme de renoncement. Le paradoxe est atteint lorsqu’on comprend que ce détachement isole des lois, de l’Etat.
Â
Mais l’Etat se méfie de la place que pourrait tenir une contre-culture, comme celle née dans les années 60, susceptible de déstabiliser l’ordre établi. C’est ainsi que la société a bien saisi l’enjeu en question en tentant de formater l’imaginaire des masses dont la publicité constitue un vecteur important.
Â
Cette contemplation subversive est un des évènements majeurs de la rentrée littéraire chez l’Arche Éditeur. Le regard acéré, que porte Christophe Pellet sur lui-même, son prochain et la société, engage une réflexion révélant le lecteur à lui-même.  A dévorer sans modération !
Â
Laurent Schteiner
Â
Pour une Contemplation subversive de Christophe Pellet
Prix conseillé 16 €
ISBNÂ : 978-2-85151-788-4
Â
L’arche Éditeur
collection tête à tête
86 rue Bonaparte
75006 Paris
Â