Françoise Morvan propose chez l’Arche éditeur une nouvelle traduction pour deux pièces d’Eugène O’Neill regroupées ici en un même ouvrage « Long voyage du jour à la nuit » et « Hughie ». Ces deux pièces emblématiques de l’auteur américain donnent à voir sa précision extrême dans l’écriture notamment avec l’abondance de didascallies. Un style particulier qui maintient le lecteur en haleine devant des tableaux presque cinématographiques tant ils sont détaillés.

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Long voyage du jour à la nuit

Il s’agit là d’une pièce quasi-autobiographique où l’on plonge avec effroi dans le quotidien d’une famille qui semble normale au demeurant. Mais très vite chacun apparaît comme névrosé, enfermé dans sa solitude. Le père acteur célèbre avare au possible n’arrive pas à communiquer avec ses deux fils:  James l’aîné alcoolique et plein de ressentiment, et Edmund faible rongé par la tuberculose. Au milieu de ces hommes une seule femme, Mary la mère lutte contre son addiction à la morphine en vain. 

C’est un chaos familial étouffant qu’Eugène O’Neill nous dépeint, un chaos qui est cependant savamment orchestré par la structure même du texte. Le lecteur fait face à de nombreuses répétitions de mots-clefs et surtout de longues descriptions de l’espace scénique par le biais des didascallies. Si ces effets de style semblent parfois oppressants, ils contribuent amplement à la fascination presque malsaine que l’on éprouve devant la misère affective de cette famille. Le lecteur est ainsi captivé jusqu’à la grande envolée lyrique finale, une belle réussite ! 

Hughie

Hughie traite également d’une forme de désespérance au travers d’un dialogue entre deux hommes cherchant un sens à leurs existences. On retrouve le même style et il y est toujours question de deux solitudes qui ne peuvent se rencontrer vraiment. Mais en mettant en scène uniquement deux personnages, Eugène O’Neill accentue la notion de rapport de force déjà présent dans la précédente pièce et confère ainsi à ce texte une atmosphère de lutte psychologique palpitante. 

« Le veilleur de nuit sent qu’il est debout depuis longtemps et ses pieds commencent à lui faire mal et il aimerait bien que le 492 arrête de parler et aille au lit, il pourrait se rasseoir et écouter les bruits de la rue et ne penser à rien. » 

Audrey Jean 

« Long voyage du jour à la nuit / Hughie  » d’Eugène O’Neill

Traduction Françoise Morvan 

ISBN 978 2 85181 816 4

16€

Arche éditeur 

86 Rue Bonaparte
75006 Paris 

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