L’Atelier Théâtre Actuel nous permet de pénétrer les secrets intimes de Fiodor Dostoïevski au travers de sa correspondance foisonnante, des lettres dans lesquelles on apprend notamment sa terrible addiction au jeu. Une occasion inespérée de voir Patrick Chesnais évoluer sur les planches et surtout s’essayer à un exercice périlleux. L’acteur lit les lettres de l’auteur russe avec aisance, faisant naitre devant nous non sans humour les contradictions du génie. 
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Si ses œuvres sont emblématiques l’on connaît mal les déboires de Dostoïevski avec le jeu. Pourtant l’auteur de nombreux chef-d’œuvres de la littérature était rongé par cette passion dévorante, tant et si bien qu’il était très endetté et vivait dans une misère quasi permanente. Le spectacle nous dévoile les lettres qu’il écrivait à ses différents créanciers, aux patrons des gazettes qui publiait les chapitres de ses romans, mais aussi à sa deuxième femme dont il était fou. On y ressent sa difficulté à lutter contre son addiction, la honte, le remord mais aussi la mauvaise foi sans bornes dont il faisait preuve pour trouver de l’argent à jouer. 

Il s’agit donc d’une lecture très sobrement mise en scène par Isabelle Ratier, et dans cet exercice le talent de Patrick Chesnais est indéniable. A l’instar d’autres grands comédiens tels que Fabrice Luchini ou Jacques Weber il réussit le pari de nous subjuguer pendant plus d’1 heure à la seule mélodie de sa voix.  En s’appropriant la correspondance personnelle de Dostoievski il nous permet de prendre la mesure de son sens inné du verbe mais surtout sa maitrise du tempo. Chaque mot est prononcé avec un naturel tel qu’il nous semble avoir devant nous l’écrivain.  Avec une simplicité désarmante il ponctue sa lecture de respirations particulièrement judicieuses installant une intimité délicieuse avec le spectateur. Beata Nilska n’est pas en reste et joue sa partition avec la même humilité. L’apparition de son personnage permet d’apporter un souffle nouveau au spectacle dans une deuxième partie où leurs lettres se répondent. Dostoïevski nous arrachait des sourires devant la cocasserie de ses mensonges, il devient bouleversant à la rencontre de cette femme, torturé de ne pas être à la hauteur de son amour. 10 ans de lettres qui permettent ainsi de l’accompagner de près et d’assister,impuissants, à la fuite désespérée que fut sa vie. 

Audrey Jean 

« Fiodor Dostoïevski, le démon du jeu » une adaptation de Virgile Tanase 
d’après la correspondance de Fiodor Dostoïevski 

Mise en scène Isabelle Rattier 

Avec Patrick Chesnais et Beata Nilska 

Festival Off d’Avignon 
Théâtre Actuel 
80 rue Guillaume Puy 

 

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